Les trois vies de Josef Klein, Ulla Lenze – 2021 – Ed. JC Lattès, 353 p.
21-02
Ulla Lenze est une écrivaine allemande. Peu connue avec ses œuvres précédentes, elle fait parler d’elle avec cette nouvelle sortie littéraire apparue en France durant la première semaine
de janvier (son premier roman traduit en français). Inspiré de la vie de son grand-oncle Josef Klein, l’écrivaine retrace, à travers cette fiction, la vie de ce dernier et de ceux qui l’ont accompagné durant son exil aux Etats-Unis
Un roman situé en pleine Seconde Guerre mondiale aux Etats-Unis. Un homme allemand immigré qui se retrouve malgré lui à participer aux manipulations nazies. Il a la volonté de tout arrêter, mais la terreur qu’il ressent face à ces hommes terrifiants qui se vouent corps
et âmes au Führer l’en empêche. C’est l’histoire bouleversante d’un homme seul, apeuré, qui va essayer de s’enfuir de cette emprise.
Résumé
A la fin des années trente, Hitler est au pouvoir. Josef a quitté l’Allemagne pour rejoindre les Etats-Unis. Éloigné de son pays natal, la guerre frappe malgré tout le continent Américain. De nombreux allemands y prépare leurs missions. Josef travaille dans une imprimerie où parfois y est distribuée de la propagande nazie. Sa vie va changer lorsque ses compétences de radio amateur vont être repérées.
Collabo sans conviction
Josef est un homme tranquille, qui mène sa vie d’exilé calmement aux Etats-Unis. La guerre commence à frapper l’Allemagne, la propagande nazie se développe. Le pays accepte l’arrivée de nombreux allemands qui sont obligés de s’amasser dans des espèces de camps pour être surveillés. Des conditions austères que subit sans plainte Josef.
Il travaille dans une imprimerie et aide Arthur qui parfois imprime et distribue de la propagande nazie pour éviter les ennuis. Arthur le met rapidement en garde lorsque Max repère le travail de Josef et lui demande de l’aider à construire une radio. Les motifs sont flous, mais il ne veut pas de problème alors Josef accepte. A ses risques et périls.
Une passion : la radio
Josef est passionné par la radio et sa technologie. Il est radio amateur. Il les construit et les utilise ensuite pour communiquer sur des ondes où il communique avec d’autres radios amateurs. Il aime échanger, l’adrénaline de ne pas savoir avec qui il entre en communication, d’être seul face à un objet qui va lui permettre de communiquer à l’autre bout de la Terre.
La communication radio n’est pas évidente, les amateurs peuvent se connecter sur une onde et écouter discrètement les conversations des autres. Alors les discussions ne sont pas bien développées « quel âge as-tu » « d’où viens-tu ». C’est ainsi qu’il va rencontrer Lauren. Plus jeune que lui, ils partagent la passion commune de la radio. Découvrant qu’ils ne résident pas loin l’un de l’autre, ils vont se rapprocher et rapidement devenir amants.
Mais leur relation va se trouver face à d’importants obstacles notamment lorsque Lauren va découvrir le rôle de Josef dans la campagne nazie. Totalement opposée aux atrocités d’Hitler, elle va tenter de remettre Josef dans le droit chemin, quitte à le trahir.
Josef retourne sa chemise
Josef est repéré par la police américaine. Il est espionné depuis un certain temps et ils ont besoin de lui pour déjouer les plans des nazis présents sur le territoire. Il va tenter de se racheter, d’expliquer qu’il a été entraîné malgré lui dans cette spirale infernale, et qu’il souhaite juste en sortir.
Il va collaborer, s’infiltrer dans l’équipe de Max pour essayer de transmettre un maximum d’informations à la police. Il a peur, car il sait que si Max découvre le subterfuge, il lui restera peu de temps avant d’être assassiné.
De cette collaboration avec la police, il sait qu’il en ressortira que peu de bénéfice. Un allègement éventuel de peine au mieux. Mais convaincu de cette nécessité, il prend le peu de courage qu’il lui reste pour essayer de déjouer les plans de Max.
Mon avis sur l’œuvre
Le roman d’Ulla Lenze est très intéressant car il traite de l’évolution de la propagande nazie sur le territoire américain. Les nazis y étaient présents et essayaient de rallier un maximum de personnes à leur cause. Alors que les Etats-Unis ne souhaitaient pas entrer tout de suite en conflit avec l’Allemagne, ils sévissaient peu.
Nous compatissons rapidement avec Josef. Cet homme de peu de courage se retrouve embrigadé dans des manigances auxquelles il n’adhère pas vraiment. Nous ne pouvons que nous mettre à sa place et comprendre, d’une certaine manière, la terreur qui a pu le guider dans ses décisions.
Faible de convictions, il n’a pas suivi le mouvement pour ses croyances face aux mesures d’Hitler. Il l’a fait car il était terrorisé à l’idée de dire « non » aux colosses qui avaient besoin de lui. Cet homme seul dans un pays qui n’est pas le sien et qui cherche à se protéger, nous le comprenons.
Il est intéressant de constater que les américains étaient, d’une certaine manière, divisés. Décidés à ne pas chercher le conflit, ils laissaient des réunions de propagande se dérouler malgré l’ampleur des dégâts qui pouvaient en découler. Alors que certains, comme Lauren, criaient pour que le gouvernement arrête cette folie, ce dernier a eu un rôle initialement plutôt passif.
L’écrivaine nous entraîne dans le récit de la honte, celle d’un homme qui n’a pas su tenir tête et qui a contribué à la réalisation d’atrocités. Celle d’un homme qui finit par être jugé de sa trahison et qui n’arrive pas à avouer à ses proches ce qu’il a réellement fait.
Conclusion
Ulla Lenze est traduite pour la première fois en français, et son roman vaut le détour. A travers ce thriller, nous parcourons les Etats-Unis et la propagande nazie qui s’y est développée à la fin des années trente. Les besoins dans le domaine de la transmission radio étaient croissants. S’inspirant de son grand-oncle, nous accompagnons le récit étonnant d’un homme victime de sa couardise. Un beau roman qui nous fait voyager de New-York à Buenos Aires, en passant par Berlin.