Florent, Marie Laberge – 2007 – Ed. Pocket, 1091 p.
21-01
L’année commence et je suis (déjà) en retard pour ma première chronique de l’année ! Je suis en train de terminer Les trois vies de Josef Klein, sorti aux Editions Lattès il y a une semaine, mais je fais une petite pause pour vous parler de la fin de la trilogie Le goût du bonheur de Marie Laberge.
Florent, c’est la fin d’une saga que j’ai complètement dévorée. En trois romans, l’écrivaine nous a fait parcourir plus de soixante années aux côtés de la famille Miller. Ce dernier roman nous plonge dans la seconde partie du XXe siècle et aborde la lente libération de l’homosexualité et les préjugés sur ce qui a longtemps été considéré comme anormal, comme une maladie. Un nouveau roman bouleversant.
Résumé
Adélaïde vient de perdre Nic et leur fille Anne, sauvagement assassinés par Kitty. Elle essaie de survivre face à cette souffrance, celle de la perte de l’être aimé et de la chair de sa chair. Florent se démène de toute part pour l’aider, pour rester présent pour Léa et Thomas, déboussolés sans leur mère. Alors que ses contacts dans le monde professionnel se développent, l’homosexualité de Florent fait petit à petit surface, l’entraînant dans des situations bien compliquées.
La perte d’un pilier de la famille
Lorsque Nic décède, la famille est perdue. Adélaïde a perdu l’homme de sa vie, celui avec qui elle souhaitait finir sa vie. Le deuil la détruit, la rend agressive, elle n’arrive plus à prendre soin d’elle ni de ses enfants.
Mais la disparition de Nic n’est pas difficile que pour elle. Les enfants se retrouvent sans leur père. Florent se démène pour les protéger d’une Adélaïde perdue dans sa souffrance, mais lui aussi subit le deuil. Nic représente le premier homme qu’il a vraiment aimé, celui pour qui son homosexualité a réellement vu le jour.
Alors que chacun tente de se reconstruire, la famille se dégrade lentement. Léa se rapproche de Florent qui devient son confident, et s’éloigne un peu de sa mère dont la souffrance est insupportable à endurer.
La folie de Pierre
Pierre, le fils de Béatrice, avait été abandonné dès son plus jeune âge par sa mère qui l’avait confié à sa tante Reine. Celle-ci l’a éduqué dans des règles catholiques strictes et une pudeur extrême. Alors que le petit garçon grandit, que ses hormones se développent, il va se perdre et mélanger les règles d’éducation qu’il a suivies, s’égarer dans la distinction du bien et du mal.
Béatrice démarre une carrière à la télévision, elle s’y exhibe et joue au jeu de la séduction. Pierre rejoint toutes les semaines sa tante Germaine pour regarder l’émission de sa mère, où il s’imagine que la séduction qu’elle met en avant est pour lui, qu’elle l’appelle.
Pierre va complètement perdre pied, il décide de la rejoindre pour lui montrer qu’il est là et qu’il ne l’oublie pas. Cette rencontre ne va pas se passer comme prévu…
L’homosexualité de Florent en premier plan
Florent est homosexuel mais n’a jamais voulu que ses « déviances » ne soient mises à jour. La seule femme qu’il aime est et sera toujours Ada. Pour le reste, son attirance se tourne vers des hommes. Dans le milieu de la mode où il travaille, il rencontre de nombreux homosexuels. Alors que certains n’hésitent pas à crier ouvertement leur homosexualité, à flirter vulgairement avec des mots crus, d’autres conservent pour eux leurs sentiments et tentent de vivre une vie normale.
Florent va découvrir les réalités de son homosexualité. Avec Francis, il va découvrir les profondeurs du désir ultime, il va devenir celui qu’il a toujours voulu être. Mais Francis est marié, il refoule son homosexualité. Mentir et trahir sa femme pour un autre homme va le détruire et va le mener à un terrible sentiment de culpabilité.
Incapable de faire face à la honte qu’il ressent au fond de lui, il va s’en prendre tant à Florent qu’à sa femme. Une violence terrible qui est la conséquence de la société à l’époque peu ouverte sur l’homosexualité.
Mon avis sur l’œuvre
Sans surprise, j’ai adoré. J’ai été un peu déçue au début du roman concernant la partie sur Pierre. L’obsession sexuelle qu’il développe pour sa mère est gênante et j’ai été mal à l’aise sur ce sujet. Mais l’écrivaine rebondit ensuite, et nous embarque dans la problématique principale de ce troisième tome.
Après avoir traité l’évolution des droits de la femme dans le premier roman ; puis les tragiques conséquences de la guerre sur la population canadienne dans le second ; nous suivons dans ce dernier roman la condition homosexuelle et les difficultés des individus à l’accepter.
Lorsque nous suivons une saga qui se joue en plusieurs romans plutôt volumineux, nous nous attachons particulièrement aux personnages. Nous prenons plaisir à les retrouver, à les suivre, à les voir grandir. Ils sont comme des amis, dont nous suivons les péripéties à distance, sans pouvoir les voir. Je me suis attachée à chacun des personnages. Ils m’ont touchée, émue, et j’aurais aimé que ça ne s’arrête jamais.
La fin de ce dernier roman est moins tragique que celui des précédents. Les protagonistes trouvent, d’une certaine manière, la paix et le bonheur. Ils ont appris à vivre avec leurs drames, à surmonter les épreuves. Ils sont des exemples qui nous rassurent lorsque nous avons l’impression d’être face à un mur. Le deuil, la trahison, le mensonge, l’infidélité… Ils en ont bavé, les personnages de Marie Laberge. Mais ça en valait bien la peine…
Conclusion
C’est avec tristesse que j’ai terminé les dernières pages de Florent. La fin est parfaite, l’histoire doit s’arrêter là, mais l’idée de ne plus accompagner les personnages dans leurs aventures provoque un pincement au cœur ! Bien que le roman soit volumineux, je l’ai dévoré d’une traite. Je ne peux que conseiller ce livre ainsi que les deux précédents, car chaque tome a été un vrai coup de cœur.